La chemise ornée de diamants

Les contes de Pensé contiennent les contes suivants : Conte d’amour, La jarre d’or, La princesse des eaux, Le bien d’autrui, Le chapeau qui rend invisible, Le conte de l’homme riche, Le roi et le barbier, L’homme et le diable, La chemise ornée de diamants, Aslanzate et Zanpolate, La fille du coffre, Frère agnelet, Crainte, Le lare domestique, Rira bien qui rira le dernier, Talou Orlan, Topal, Le cerf-volant révélateur, Le chasseur Ahmad, Le derviche et les filles, La fille du roi de Chine, Grain-de-grenade, Nerso

La chemise ornée de diamants

Il était une fois, près de la ville de Manazgerd, dans un village appelé Agner, une femme qui vivait avec son fils unique. Cette femme était très misérable. Dès que l’enfant fut en âge de garder les vaches, elle le fit embaucher par le propriétaire du troupeau.

Un jour de malchance, l’enfant perdit un veau. Le maître lui donne une bonne fessée et lui dit :

 » trouve ce veau, sinon je te tue ! « 

L’enfant cherche de tous côtés, il ne trouve pas le veau. Il s’agenouille et prie :

 » Ah ! Chevalier lumineux, Saint Sarkis, viens à mon secours ! « 

A peine a-t-il dit ces mots, béni soit son pouvoir, voilà Saint Sarkis qui arrive, il prend le garçon, il le met sur son cheval, il l’emmmène en Egypte, il lui recommande de faire sa prière tous les soirs avant de s’endormir.

Les années passent… Un soir, le jeune homme oublie la recommandation, il oublie de faire sa prière, il s’endort.

Le matin, en ouvrant les yeux, il voit qu’il est dans sa vieille maison, couché sur la paille. Mais il avait rapporté avec lui une chemise ornée de diamants. La mère et le fils cachent la chemise de peur que le maître la prenne à la place du veau.

Quant à nous, allons en Egypte.

Neuf mois et neuf jours plus tard, à la minute prévue, la fille du roi d’Egypte se couche et donne naissance à un beau bébé. Or, cet enfant pleurait nuit et jour, il criait, on avait beau faire, il n’y avait pas moyen de le faire taire.

Les conseillers du roi se réunissent, ils conseillent à la princesse de prendre avec elle un sac d’or, de monter à cheval, d’aller de pays en pays, de voir les villes, de faire construire des ponts… Peut-être Dieu aura-t-il pitié d’elle et fera taire l’enfant.

La fille du roi se met en route, elle va à Damas, à Alep, à Diarbékir, à Sassoon-khut, elle descend dans le val de Mouch, elle arrive enfin dans le village D’agner près de Manazgerd. Elle décide de faire construire un grand pont sur le fleuve Mourad. Tous ceux qui n’avaient pas de travail sont embauchés, tous ceux qui avaient faim sont rassasiés.

Le fils de la misérable femme se présente également à l’embauche. Il se met au travail, il reçoit son salaire. Le soir, il rentre à la maison.

La princesse et le jeune homme ne se reconnaissent pas, Saint Sarkis avait obscurci leur vue et leur esprit, car sa recomandation n’avait pas été suivie.

La fille du roi, qui avait donné du travail aux gens, avait une arrière-pensée. Elle ordonna que tous les ouvriers, jeunes ou vieux, entrent un par un dans sa chambre, bercent l’enfant, et retournent chez eux.

Le fils de la pauvre femme vient à son tour bercer l’enfant. A peine a-t-il touché le berceau que l’enfant, chut, se tait immédiatement. On emmène le jeune homme auprès de la fille du roi.

 » Qui es-tu ?  » demande la princesse.

 »  Moi, je suis le vacher de ce village. Je n’avais pas de travail, grâce à toi je gagne ma vie. « 

 »  Bien, demain tu viendras bercer mon enfant  » dit la fille du roi.

 »  A tes ordres  » dit le jeune homme.

A peine est-il sorti que l’enfant se remet à pleurer et crier, si fort que tout le monde se bouche les oreilles. On a beau faire, il n’arrête pas de crier.

La fille du roi dit :  » Vite, allez chercher le vacher ! « 

On ramène le vacher. Il a à peine touché le berceau que l’enfant se tait.

La princesse lui donne une poignée d’or et le supplie de rester près du berceau. L’enfant s’arrêtera de pleurer et ses oreilles auront la paix.

Le jeune homme dit :  » Tes ordres sont sacrés pour moi, mais je ne peux pas rester « 

 » Pourquoi ?  » dit la fille du roi.

 »  Ma mère est devenue vieille, elle est seule, elle ne peut pas se passer de moi « 

  • Bon, vas-y ! dit la fille du roi.

Il met à peine le pied dehors que l’enfant remplit le monde de ses cris. La fille du roi est bouleversée, elle s’assoit et se met à pleurer, elle maudit son sort, elle ne sait plus quoi faire.

Elle fait appeler encore une fois le jeune homme. Il arrive ; l’enfant arrête de crier. Tandis que le jeune homme le berce, la fille du roi l’enlace, elle lui dit des mots doux. L’enfant est calme, il sourit.

Un soir, le jeune homme dit à sa mère :

 » Mère, je ne comprends pas ce miracle, quand les autres le bercent, l’enfant crie sans arrêt ; quand moi je le berce, chut, il se tait. Pourquoi ? « 

 »  Dieu seul le sait, un être humain ne peut pas le comprendre  » dit la mère.

 »  Mère, la fille du roi a été très gentille envers moi, je lui suis redevable, que pourrions-nous lui offrir ? « 

La mère répond :

 » Mon enfant, viens, donne-lui la chemise ornée de diamants, qu’elle la porte, nous aurons fait une bonne action et, en outre, nous serons délivrés de la peur du maître « .

 » Bonne idée, le maître pourrait venir un jour, la trouver et l’emporter  » dit le fils.

La mère sort la chemise, elle la plie et la replie, l’emballe dans un joli tissu, la remet à son fils, l’envoie chez la fille du roi.

Au moment où il entre dans la chambre, l’enfant arrête de crier, le jeune homme déballe la chemise, il l’offre à la princesse.

Tout à coup, le mystère s’éclaircit. Par le pouvoir de Saint Sarkis, tous deux se reconnaissent ! Ils prennent l’enfant, ils vont chez la mère, ils l’emmènent avec eux en Egypte.

Le jeune homme devient roi, la princesse devient reine.

Chevalier lumineux Saint Sarkis, béni soit ton pouvoir, qu’il s’étende sur celui qui raconte cette histoire et sur ceux qui l’écoutent !