Le chasseur Ahmad

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Le chasseur Ahmad

Le chasseur Ahmad, un jour, tire une gazelle, il veut faire rôtir le cœur, il allume un f eu et se prépare à manger le cœur rôti. Tout à coup, il voit un serpent sortir de son trou, déposer une oie, et redescendre.

Peu après, un serpent noir crasseux vient se dresser à côté de l’oie ; il siffle, et un très joli serpent sort du trou. Il s’enroule comme une pelote, roule autour de l’oie, s’approche du serpent noir. Tous deux s’enlacent, s’accouplent, prennent du plaisir.

Le chasseur Ahmad est dégoûté. Il tire, pan ! le serpent noir a la queue coupée, il se sauve. Le joli serpent aussi se sauve, il rentre dans le trou. Le chasseur Ahmad prend son gibier sur l’épaule, rentre à la maison et raconte à sa femme tout ce qu’il a vu.

Le lendemain, deux gendarmes turcs viennent devant la porte. Ils disent :

  • Chasseur Ahmad, partons, le roi te demande.
  • Mon Dieu ! qu’ai-je à faire avec le roi ? Je ne suis qu’un chasseur ; du matin au soir je parcours la montagne, le soir je rentre chez moi. Pourquoi le roi s’intéresserait-il à moi ?
  • Il faut absolument que tu viennes, si tu ne viens pas, tu auras des ennuis, tu le regretteras.

La femme dit :

– Homme, vas-y ! Le roi des braves t’appelle. S’il te dit :  » Que veux-tu ? je te le donne.  » dis que tu ne veux rien. Dis seulement :  » mets ton petit doigt dans ma bouche et ressors-le. « 

Les gendarmes emmènent le chasseur Ahmad. Ils marchent, ils marchent. Un imposant portail s’ouvre. Ils entrent, et quel spectacle ! une foule de serpents indescriptibles se dressent devant le roi, fixant attentivement sa bouche.

– Mortel, dit le roi, pourquoi as-tu eu l’impudence de blesser l’épouse du roi ?

Le chasseur Ahmad répond :

  • Longue vie au roi ! moi, si éloigné de l’épouse du roi, quand aurais-je pu commettre une telle action ?

Le roi dit :

  • Tu es chasseur, hier qu’as-tu vu ? qu’as-tu fait ?
  • Longue vie au roi ! dit le chasseur, hier j’ai tiré une gazelle, j’ai fait rôtir le cœur, au moment de le manger, j’ai vu sortir d’un trou une tête de serpent, il a déposé une oie et est redescendu. Peu après, un serpent noir crasseux est venu près du trou, il a sifflé, et à son sifflement, un joli serpent a sorti sa tête, il s’est enroulé comme une pelote, a roulé autour de l’oie, les deux serpents se sont enlacés, accouplé, ont pris du plaisir ; ça m’a dégoûté, j’ai tiré, la queue du serpent noir a été coupée, il l’a laissée et s’est sauvé, le joli serpent aussi s’est sauvé, il est rentré dans le trou. Voilà toute l’histoire, je n’ai rien fait d’autre.
  • Si l’on t’apporte l’un de ces serpents, tu le reconnaîtrais ?
  • Ordonne, qu’il vienne, peut-être que je le reconnaîtrais.

Le roi fait signe. Tous les serpents sortent, ils se mettent à siffler. A leur sifflement, il ne reste plus un seul serpent dans le pays. Tous accourent et se rangent devant le chasseur .

Le serpent noir n’est pas là.

L’un des serpents informe le roi qu’à tel endroit, le fils d’une telle vieille femme n’est pas venu.

Le roi ordonne qu’on aille le chercher.

Les gardes y vont, ils voient que justement le fils de cette vieille femme a la queue coupée. Il est couché dans son lit, il gémit. Les gardes l’emportent.

Dès qu’il le voit, le chasseur Ahmad dit :

 » Voilà, c’est lui ! « 

Le roi condamne à mort le fils de la vieille femme, ainsi que sa propre épouse.

Puis il se tourne vers le chasseur :

  • Toi, dis-moi ce que tu veux. Tout ce que ta langue demandera, je te l’accorderai.
  • Longue vie au roi ! dit le chasseur Ahmad. Je ne veux rien. Je te demande seulement de mettre ton petit doigt dans ma bouche et de l’enlever aussitôt
  • Ah ! que ton conseiller se rompe le cou ! dit le roi. Tu me demandes une chose impossible, mais ce qui est promis doit être accordé !

Il met son petit doigt dans la bouche d’Ahmad, aussitôt les yeux du chasseur s’ouvrent, il acquiert d’autres savoirs, son intelligence se développe,il comprend le langage des oiseaux, les fleurs et les plantes se mettent à lui parler, l’une dit :  » moi, je suis le remède pour telle maladie  » une autre dit :  » et moi pour telle autre maladie « .

Les médecins apprennent par le chasseur Ahmad tous les médicaments et remèdes, et cette science se répand dans le monde entier.