To’a et Tane

Ce n’est vraisemblablement qu’au XIe siècle voire au XIVe siècle que les îles auraient accueilli leurs premiers habitants, très certainement originaires de Tahiti, peuplé bien avant. Voici la légende de Havai : To’a et Tane.

La légende de Havai : To'a et Tane

La légende de Havai raconte le mauvais accueil que les habitants de Tubuai firent à leur nouveau roi Tane et comment il se vengea contre son peuple avec l’aide de son ami To’a, le roi de Rurutu.

To’a et Tane voyageaient dans le grand Océan. Lorsqu’ils parvinrent dans le chenal qui sépare Tahiti de Moorea, ils rencontrèrent la reine de Tahiti qui se rendait à Moorea. La Reine les prit et les emmena à Tahiti et leur fournit des vivres jusqu’à ce qu’ils fussent rassasiés. Ensuite, elle les laissa continuer leur voyage. Ils arrivèrent à l’île de Tubuai. Tane débarqua et devint roi de Tubuai et To’a continua son voyage jusqu’à l’île de Rurutu où devint roi de cette île.

To’a, roi de Rurutu, prit pour femme Teoa qui était la fille de Maariri dont il eut un enfant nommé Tane Au’ura. Et voici ce que firent les gens de Rurutu envers le roi To’a : ils lui apportaient de mauvaises victuailles, des jeunes fruits de l’arbre à pain tombés à terre (uru pî a’aiâ) du taro immangeable (mai) susceptibles de lui fait beaucoup de mal.

Or, il ne se trouve qu’un seul homme à Rurutu qui apporte de bons aliments : du uru mûr à point (maoa) du « taro » gros et bon, et cet homme s’appelait Te-ihi-Taura (l’adroit en astronomie). Il avait le cœur compatissant.

Le roi ne disait mot ; il recevait ces aliments et les mangeait sans rien refuser, mais, au fond, ses entrailles en souffraient et son cœur était plein de tristesse.

Alors que son beau-père Maariri pêchait au tautai tao-raora (pêche au lancer) du soir au matin, pendant plusieurs jours il demeurait sans rien prendre : « aora roa’ ’e e maia » (sans aucune chance)

Cependant, il arriva qu’un jour To’a s’en fût se promenant sur le rivage, où il vit, suspendu à un arbre de fer (toa) l’hameçon de son beau-père. Il le prit en mains et le lança devant la Pointe de Outu-i-tai-tauraa (pointe à la mer du perchoir). Sa ligne tomba au fond de la mer et, peu de temps après, il l’en retira avec une bonne prise. To’a lança une seconde fois son hameçon au même endroit et le tira encore avec un gros poisson au bout de sa ligne et ainsi de suite.

La nouvelle se répandit dans toute l’île. On disait : « Ua ma’ia te matau a To’a » (l’hameçon de To’a est chanceux…) Cette rumeur parvint aux oreilles de Maariri, qui en eut le cœur plein de jalousie et de colère, car son hameçon était chanceux entre les mains de To’a et non entre les siennes.

Maariri vint au rivage, s’empara d’un gros, bâton et en frappa To’a. Celui-ci resta sur place, pleura et tournait ses pensées vers son ami Tane, lorsqu’il aperçut un bateau, au loin vers l’Ouest, en face de Vaioini, qui s’en vint dans sa direction. Il fit signe au bateau d’approcher et, quand il fut à portée de voix, cria : « Où vas-tu ? »

Are’eoa, le propriétaire du bateau a répondu : « Je vais à Tubuai… »
To’a lui dit : « Lorsque tu arriveras à Tubuai, tu iras trouver mon ami Tane, et tu lui diras : « Embarque-toi pour Rurutu ».

Are’aoa lui a répondu : « Que dois-je lui dire encore ? « .
Tu lui diras : « la passe de Tauraa est pleine d’épines (tataramoa), voici le rocher surmonté et le récif caché par les vagues »
« Est-ce tout ? » lui dit Are’aoa. « C’est tout… », répondit To’a.

Le bateau partit pour Rurutu où Are’aoa débarqua. Il s’en fût trouver Tane, et lui dit : « To’a t’envoie un message : il te demande de partir pour Rurutu. »
« Ne t’a-t-il rien dit d’autre ? ».
« Il m’a dit en plus : « la passe de Tauraa est pleine de tataramoa, et puis, que le rocher (To’a) et les récifs sont envahis et cachés par les vagues.»…

Les gens de Rurutu, apercevant le bateau, crièrent : « Un bateau… en face de Arei… ». La nouvelle parvint à To’a. Il envoya son fils Tane Au’ura pour s’assurer de la chose. Ce dernier revint, et dit à son père : « Le bateau est près de Tutaera’o »

Le père a répondu : « Retourne au rivage ». Puis le fils revint : « Il est à Areiuna » « Vas-y encore.. » Il est en face de Avarua » « Retourne encore…. » Le fils revint et dit : « Il est près de Vaiô (eau qui creuse). » « Retour à nouveau, mon fils, et regarde bien…. ». Il s’en fut en courant, revint, et dit à son père To’a : « Le bateau est tout près de Hue ».

To’a prit son fils et sa femme et les enferma dans leur case. Il se ceintura de son mâro, prit sa lance et la… (peipei a’era i ta’na omore), courut sur le rivage en se proposant devant la passe de Hotuava. Il y avait alors là une foule de gens.

Le bateau s’approcha, Tane vit son ami To’a et lui cria : « Où est l’eau que je peux en boire ? ». To’a fit un signe de tête et dit : « Elle est derrière mon dos…. « . Tane saisit sa lance et la lança de telle façon qu’elle alla se ficher dans la poitrine de Maariri qui s’affaissa et rendit le dernier soupir.

To’a et Tane se retournèrent alors, contre les gens de Rurutu et les exterminèrent tous, à l’exception de Teihi Taurua et de ceux de sa maison, car il avait été le seul à apporter à To’a de bons aliments : de gros uru, de gros taro.

Ainsi prit fin ce sanglant carnage.