La Mort violente du fils unique d’Aife

Voici l’histoire de la Mort violente du fils unique d’Aifé, de la branche rouge de la mythologie irlandaise.

la Mort violente du fils unique d'Aifé

La Mort violente du fils unique d’Aifé

Pourquoi Cûchulainn tua-t-il son fils?

Ce n’est pas difficile.

Cûchulainn était allé apprendre les armes chez Scathach Uanaind, fille d’Ardgeimm, en Letha, jusqu’à ce qu’il eût acquis avec elle la maîtrise de l’escrime.

Aifé, fille d’Ardgeimm, vint le trouver; il la rendit grosse, et lui dit qu’elle enfanterait un fils.  » Garde cet anneau, dit-il, jusqu’à ce qu’il aille à ton fils. Quand il lui ira, qu’il vienne me chercher en Irlande; que personne ne le détourne de sa route, qu’il ne se fasse connaître à personne et qu’il ne refuse le combat singulier à personne ! « 

L’enfant, au jour de ses sept ans, partit chercher son père.

Les Ulates tenaient une assemblée à Tracht Eisi quand ils virent le fils venir à eux à travers la mer sur une barque de bronze, des rames dorées dans ses mains. Il avait un tas de pierres dans la barque; il mettait une pierre dans sa fronde et la lançait d’un coup à retour contre les oiseaux; il les prenait vivants, et les relâchait dans l’air. Il faisait un tour avec son palais entre ses mains, en sorte que l’oeil ne le pouvait suivre ; il accordait sa voix à la leur et les faisait tomber une seconde fois, puis il les ranimait encore une fois.

 » Eh bien, dit Conor, malheur au pays où vient ce garçon-là ! Si c’étaient les hommes faits de l’île d’où il arrive qui nous venaient, ils nous moudraient en poussière, puisque c’est un petit garçon qui fait ces tours-là. Que l’on aille à sa rencontre et qu’il n’aborde pas ici !

– Qui ira à sa rencontre ?

– Qui ? dit Conor, sinon Condéré fils d’Echu ?

– Pourquoi Condéré ? dit chacun.

– Ce n’est pas difficile, dit Conor. S’il est question de raison et d’éloquence, c’est Condéré qui convient là.

– J’irai à sa rencontre « , dit Condéré.

Condéré partit et, au même moment, le garçon abordait le rivage.  » Tu es assez loin, mon garçon, dit Condéré, pour nous apprendre d’où tu viens et quelle est ta race.

– Je ne me fais connaître à personne, dit le jeune homme, et je n’évite personne.

– Tu n’aborderas pas, dit Condéré, avant de t’être fait connaître.

– Je vais retourner là d’où je suis parti.  » dit le jeune homme.

Le garçon fit demi-tour. Alors Condéré lui dit :  » Tourne-toi vers moi, mon fils : il y a des hauts faits, il y a des biens de mineur, orgueil des guerriers des Ulates, pour toi. Car Conor te protège… Tourne-toi vers Conor, le vaillant fils de Ness; vers Sencha fils de Cosera; vers Cethern à la lame rouge, fils de Fintan, feu qui endommage les armes; vers Amergin le savant; vers Cumscraid aux grandes troupes. Heureux celui que Conall le Victorieux protège… Je me vante, dit Condéré, d’aller au-devant d’un garçon imberbe, impubère, à moins que les Ulates ne le permettent pas.

– Tu as bien fait de venir à nous, dit le garçon; tu auras la conversation que tu veux… Retourne, dit le garçon, car lors même que tu aurais la force de cent hommes, tu n’es pas capable de t’opposer à moi.

– C’est bien, dit Condéré, qu’un autre alors vienne te parler ! « 

Condéré alla trouver les Ulates et leur raconta son histoire.  » Il ne sera pas dit, dit Conall le Victorieux, que l’honneur des Ulates soit emporté, tant que je suis en vie !  » Il alla alors vers le garçon.  » Il est joli, ton jeu, mon garçon, dit Conall.

– Ce n’est pas contre toi qu’il sera plus laid. « , dit le garçon.

Il mit une pierre dans sa fronde. Il la lança dans l’air par un coup à retour, en sorte que le bruit et le tonnerre qu’elle fit en montant arriva jusqu’à Conall et le jeta sur le dos. Avant qu’il se fût relevé, le garçon lui avait lié les mains avec la courroie de son bouclier. –  » Qu’un autre aille contre lui !  » dit Conall. C’est ainsi que le garçon se moquait de l’armée.

Cependant Cûchulainn assistait à ce jeu et il alla vers le garçon. Emer fille de Forgall mit le bras autour de son cou :  » Ne descends pas là, dit-elle. C’est un fils à toi qui est en bas. Ne nous venge pas sur ton fils unique !… Il n’est pas loyal ni sage de te lever contre ton fils valeureux… Tourne-toi vers moi ! Écoute ma voix ! Mon avis est bon. Puisse Cûchulainn l’entendre ! Je sais quel nom il va dire, si c’est Conla, le fils unique d’Aifé, qui est le garçon là-bas », dit la femme.

Alors Cûchulainn répondit :  » Tiens-toi, ô femme !… Même si c’était lui qui est là, ô femme, dit-il, je le tuerais pour l’honneur des Ulates. « 

Alors il descendit lui-même.  » Il est joli, mon garçon, le jeu que tu fais, dit-il.

– Votre jeu à vous n’est pas tel, dit le petit garçon, que deux d’entre vous ne soient pas venus pour que je me fasse connaître à eux.

– Est-ce qu’il aurait fallu qu’un jeune garçon vînt en ma compagnie ?, dit Cûchulainn. Tu vas mourir si tu ne te fais pas connaître. – Eh bien, soit !  » dit le garçon.

Le fils se jette sur lui. Ils se frappent l’un l’autre. Le garçon lui coupe la chevelure avec son épée d’un coup bien envoyé.  » Assez de plaisanteries ! dit Cûchulainn. Allons enfin lutter.

– Je n’atteins pas à ton ceinturon.  » dit le fils.

Il monta sur deux pierres et mit Cûchulainn entre deux piliers de pierre trois fois et le fils ne bougea ni l’un ni l’autre de ses pieds jusqu’à ce qu’ils eussent pénétré dans les pierres jusqu’aux chevilles. La trace de ses pieds y est encore. C’est pour cela qu’on dit le Rivage de la Trace chez les Ulates. Ils entrèrent dans la mer pour se noyer l’un l’autre, et le fils le fit plonger deux fois. Cûchulainn alla vers lui hors de l’eau et le prit en traître avec le javelot à sac (gae bolga – javelot foudre). Scathach n’avait enseigné le maniement de cette arme qu’au seul Cûchulainn. Il le lance contre le fils, dans l’eau, en sorte que les entrailles lui tombent sur les pieds.

 » Voilà donc, dit-il, ce que ne m’a pas enseigné Scathach ! Malheur à toi qui m’as blessé ! dit le fils.

– C’est vrai.  » dit Cûchulainn.

Il prend son fils entre ses bras, l’enlève de là et le porte jusqu’à ce qu’il arrive devant les Ulates.

 » Voici mon fils devant vous, ô Ulates, dit-il.

– Hélas! répondirent les Ulates.

– C’est vrai, dit le fils. Si j’avais été parmi vous en cinq ans, j’aurais vaincu les hommes de la terre en votre présence de chaque côté, et vous auriez eu l’empire jusqu’à Rome. Puisqu’il en est ainsi, montrez-moi les hommes illustres qui sont ici, que je leur dise adieu ! « 

Alors il mit les bras autour du cou de chacun d’eux l’un après l’autre; il dit adieu à son père et mourut aussitôt.

On fit la lamentation funèbre, la tombe et la pierre, et pendant trois jours aucun veau ne fut laissé aux vaches en Ulster à la suite de cela.

Mythologie Sérère