Voici l’histoire de Tuan Mac Cairell du cycle mythologique irlandais.
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1. Lorsque Finnen de Moville fut venu avec les Evangiles en Irlande, dans le territoire des hommes d’Ulster, il vint là où résidait un riche guerrier, qui ne les invita pas auprès de lui dans sa forteresse, mais les laissa jeûner au-dehors jusqu’au dimanche. La foi du guerrier n’était pas bonne. Finnen dit à ses disciples: « Il va venir à vous un homme bon, qui va vous réconforter, et qui vous dira l’histoire de l’Irlande depuis sa première colonisation jusqu’à maintenant. »
2. Alors tôt le lendemain matin un vénérable moine vint à eux qui leur souhaita la bienvenue. « Venez avec moi jusqu’à mon ermitage, dit-il, c’est plus convenable pour vous. » Ils allèrent avec lui, et ils célébrèrent les rites du jour du Seigneur, tant par psaumes que par prédications et offrandes. Sur quoi Finnen lui demanda de dire son nom. Il leur dit: « Je suis des hommes d’Ulster. Je suis Tuan, fils de Cairell, fils de Muredach au Cou-rouge. J’ai pris cet ermitage, dans lequel tu te tiens, sur la terre héréditaire de mon père. Tuan, fils de Starn, fils de Sera, fils du frère de Partholon, ce fut premièrement mon nom autrefois. »
3. Alors Finnen lui demanda ce qu’il en était des événements d’Irlande, à savoir, ce qui s’y était déroulé depuis le temps de Partholon, fils de Sera. Et Finnen dit qu’ils ne mangeraient pas avec lui jusqu’à ce qu’il leur ait raconté les histoires de l’Irlande. Tuan dit à Finnen: « Il est difficile pour nous de ne pas méditer la Parole de Dieu que tu viens juste de nous proclamer. » Mais Finnen dit: « Permission t’es accordée de nous raconter tes propres aventures et l’histoire d’Irlande maintenant. »
4. « Cinq fois, en vérité, dit-il, l’Irlande a été prise après le Déluge, et elle ne fut pas prise après le Déluge jusqu’à ce que 312 années soient écoulées. Alors Partholon, fils de Sera, la prit. Il était parti en voyage avec vingt-quatre couples. L’ingéniosité de chacun n’était pas plus grande que celle des autres. Ils s’établirent en Irlande jusqu’à ce qu’ils soient 5000 de leur race. Entre deux dimanches, une maladie s’abattit sur eux, si bien qu’ils moururent tous, hormis un seul homme. Car il n’y a pas de massacre sans que quelqu’un n’en réchappe pour en dire l’histoire. Je suis cet homme, » dit-il.
5. « Alors j’allais de colline en colline et de falaise en falaise, me gardant des loups pendant vingt-deux4 ans durant lesquels l’Irlande fut vide. Finalement la vieillesse vint sur moi, et j’allais par les falaises et les friches, et je me remuais difficilement, et j’avais des abris particuliers pour moi.
6. « Alors Nemed, fils d’Agnoman, le frère de mon père, envahit l’Irlande, et je les voyais depuis les falaises et je les évitais. Et j’étais hirsute, griffu, desséché, gris, nu, misérable, malheureux. Alors, une nuit, comme je dormais, je me vis prenant la forme d’un cerf. Sous cette apparence j’étais, jeune et le coeur content. C’est alors que je dis ces paroles : »
Sans force aujourd’hui est le fils de Senba,
Il a été dépourvu de vigueur,
Sans belle renommée avec sa force renouvelée.
Le fils de Senba est vieux.
Ces hommes venus de l’est
Avec leurs lances qui donnent la bravoure,
Je n’ai pas la force dans les pieds ou les mains
Pour les éviter.
Starin, redoutable est l’homme,
Je crains Scemel au blanc bouclier,
Andind ne me sauvera pas, bien qu’il soit bon et juste,
Si c’était Beoin, ***
Bien que Beothach me laisserait en vie,
La lutte brutale de Cacher est rude,
Britan acquiert la valeur par ses lances,
Fergus a une crise de fureur.
Ils viennent vers moi, Ô doux Seigneur,
Les descendants de Nemed, fils d’Agnoman,
Energiquement, ils mentent dans l’attente de mon sang,
Pour me donner ma première blessure.
Alors ont poussé sur ma tête
Deux andouillers à trois vingtaines de pointes,
De sorte que je suis grossier et gris de forme
Après que mon temps est passé de la faiblesse.
7. « Après cela, durant le temps où je fus sous la forme d’un cerf, je fut le maître des hardes d’Irlande, et partout où j’allais il y avait une grande harde de cerfs avec moi. C’est ainsi que j’ai passé ma vie durant le temps de Nemed et de ses descendants. Lorsque Nemed vint avec sa flotte en Irlande, leur nombre était de trente-quatre vaisseaux, à trente par vaisseau, et la mer les dévoya durant une année et demie sur la Mer Caspienne, et ils furent submergés et moururent de faim et de soif, hormis quatre couples en compagnie de Nemed. Par la suite, sa race s’accrut et eut une descendance jusqu’à ce qu’il soient 4030 couples. Cependant, ils moururent tous.
8. « Alors finalement, la vieillesse vint sur moi, et je pris la fuite devant les hommes et les loups. Une fois, comme j’étais devant ma grotte — je m’en souviens encore – je sus que je passais d’une forme dans une autre. Alors je passais dans la forme d’un sanglier sauvage. C’est alors que je dis :
Un sanglier je suis aujourd’hui au milieu des troupeaux,
Je suis un seigneur puissant avec de grands triomphes,
Il m’a mis dans la peine merveilleuse,
Le Roi de tous, sous de nombreuses formes.
Le matin où j’étais à Dun Bré,
Luttant contre de vieux sages
Belle était ma troupe à travers l’eau,
Une magnifique armée nous suivait.
Les miens, ils étaient rapides
Parmi les armées dans la vengeance,
Ils auraient jeté mes lances alternativement
Sur les guerriers de Fál de chaque côté.
Quand nous étions dans notre assemblée
Décidant les jugements de Partholon,
Doux à tous était ce que je disais,
Tels étaient les mots de la véritable ouverture.
Agréable était mon jugement brillant
Parmi les femmes de beauté,
Majestueux était mon char étincelant,
Douce était ma chanson à travers une route sombre.
Rapides étaient mes pas sans vagabondage
Dans les batailles d’emblée,
Beau fut mon visage, un jour,
Bien qu’aujourd’hui je sois un verrat.
9. « Sous cette forme, dit-il, je fus vraiment, jeune et l’esprit joyeux. Et j’étais roi de toutes les troupes de sangliers d’Irlande, et je faisais toujours des visites à ma demeure lorsque je venais dans cette contrée d’Ulster au temps de ma vieillesse et de ma décrépitude; car en ce même lieu je passai dans toutes ces formes. Par conséquent je visitais toujours cet endroit pour attendre le renouveau.
10. « Sur ce Semion, le fils de Stariath, s’empara de cette île. De lui descendent les Fir Domnann, et les Fir Bolg, et les Galuin; et ceux-ci habitèrent cette île au temps où ils séjournèrent en Irlande. Alors la vieillesse vint sur moi, et mon esprit était triste, et j’étais incapable de faire tout ce que j’avais l’habitude de faire auparavant, mais j’étais seul dans des grottes sombres et dans des falaises écartées.
11. « Alors j’allai vers ma propre demeure. Je me souvenais de toute les formes que j’avais prises auparavant. Je jeûnais trois jours comme je l’avais toujours fait. Il ne me restait aucune force. Sur quoi je pris la forme d’un grand faucon. Alors mon esprit se réjouit de nouveau. Je pouvais tout entreprendre. J’étais impatient et vigoureux. J’aurais volé à travers l’Irlande; j’aurais découvert n’importe quoi. C’est alors que je dis :
Un faucon aujourd’hui, un sanglier hier,
***. inconsistance merveilleuse !
Plus cher m’est chaque jour
Dieu, l’ami qui m’a donné forme.
Nombreux sont les descendants de Nemed
Sans obéissance***. au vrai roi,
Réduite aujourd’hui est la race de Sera ;
Je ne sais pas ce qui en est la cause.
Parmi des troupeaux de sangliers j’étais,
Bien qu’aujourd’hui je sois parmi les oiseaux ;
Je sais ce qui en adviendra :
Je serai toujours dans une autre forme.
Merveilleusement a disposé mon Dieu aimé
De moi et des enfants de Nemed ;
Eux à la volonté du démon de Dieu,
Tandis que, pour moi, Dieu est mon secours.
12. « Beothach, fils de Iarbonel le prophète, s’empara de cette île au dépens de ceux qui l’occupaient. C’est de lui que viennent les Tuatha Dé et Andé, dont les savants ne connaissent pas l’origine, mais il leur semble probable qu’ils venaient des cieux, compte tenu de leur intelligence et de l’excellence de leur savoir.
13. « Alors je fus longtemps sous la forme d’un faucon, si bien que je survécus à toutes ces races qui envahirent l’Irlande. Cependant, les fils de Mil prirent cette île aux Tuatha Dé Danann par la force. Alors j’étais sous la forme du faucon que j’avais été, et j’étais dans le creux d’un arbre près d’une rivière.
14. « Là, je jeûnais pendant trois jours et trois nuits, puis le sommeil tomba sur moi, et je passai sur-le-champ dans la forme d’un saumon de rivière. Alors Dieu me mit dans la rivière si bien que j’y fus. Une fois de plus je me sentis heureux et vigoureux et bien nourri, et ma nage était bonne, et j’échappais régulièrement aux dangers et aux filets — à savoir, des mains des pêcheurs, des serres des faucons, et des lances à pêcher — si bien que toutes les cicatrices que chacun à laissé sont encore sur moi.
15. « Une fois, cependant, lorsque Dieu, mon secours, jugea le temps venu, alors que les bêtes me poursuivaient, et que chaque pêcheur dans chaque trou d’eau me connaissait, le pêcheur de Cairell, le roi de ce pays, m’attrapa et me porta à la femme de Cairell qui avait envie de poisson. Je m’en rappelle bien; l’homme me posa sur un grill et me mit à dorer. Et la reine eut envie de moi et me mangea en entier, si bien que je fus dans sa matrice. Je me souviens encore du temps où je fus dans sa matrice, et de ce que chacun lui dit dans la maison, et de ce qui fut fait en Irlande à cette époque. Je me souviens aussi du moment où la parole me vint, comme elle vient à tout homme, et je savais tout ce qui avait été fait en Irlande. Et je fus un prophète; et un nom me fut donné — à savoir, Tuan, fils de Cairell. C’est alors que Patrick vint porter la foi en Irlande. Alors j’étais d’un grand âge; et je fus baptisé, et, tout seul, je crus dans le Roi de toutes choses par ses rudiments.’
16. Alors ils célébrèrent la messe et allèrent au réfectoire, Finnen avec ses disciples et Tuan, après qu’il leur eût raconté ces histoires. Et là ils restèrent une semaine conversant ensemble. Chaque histoire et chaque généalogie qu’il y a en Irlande, c’est de Tuan, fils de Cairell, que vient son origine. Il avait conversé avec Patrick avant eux, et lui avait tout dit; et il avait conversé avec Colum Cille, et lui avait prophétisé en présence des gens du pays. Et Finnen lui offrit de rester avec lui, mais il ne put avoir son accord. « Ta maison sera fameuse jusqu’au jugement dernier, » dit Tuan.