Contes basques 29

Contes basques

Voici divers contes basques : la dame d’Orhy, les dettes de Dieu, la lamina ravisseur

contes basques

La Dame d’Orhy

Un jour, un berger découvrit dans un gouffre de la région d’Orhy une femme qui se peignait avec un peigne en or. Elle dit au berger :
« – Si, le jour de la Saint Jean, tu me portes sur tes épaules pour sortir de ce lieu, je te donnerai autant de richesses que tu voudras ; mais tu ne devras avoir peur de rien, quoiqu’il arrive. »

Le berger promit et, le jour de la Saint Jean, il prit la femme sur ses épaules et commença à marcher. Mais aussitôt, toutes sortes d’animaux sauvages ainsi qu’un énorme serpent qui crachait du feu, sortirent sur le chemin et l’effrayèrent.
Alors, laissant la femme sur place, il se mit à courir et sortit du gouffre. La femme criait :
« – Malheur à moi, je suis encore ici pour mille ans ! « 


Les dettes de Dieu

Le bon Dieu, au temps où il parcourait le monde, arriva un jour avec saint Pierre dans une grande ville. Et pendant que le divin voyageur suivait les longues rues, des pauvres de toute espèce, vieux impotents, vieilles flétries, hommes perclus, enfants affamés, sortaient de tous les coins demandant l’aumône aux passants.

L’aumône reçue, les pauvres remerciaient en disant :
– » Dieu vous paiera ».
Cette parole, toujours la même, jetait beaucoup d’inquiétude dans l’esprit de saint Pierre, si bien que, n’y pouvant plus tenir, il s’emporta et dit au bon Dieu :
– » Seigneur, je ne veux plus marcher avec vous. Vous avez trop de dettes. Jamais vous ne pourrez payer tous ceux que les pauvres vous envoient ».
– » S’il t’ennuie de demeurer avec moi, Pierre, tu peux aller de ton côté », répondit le bon Dieu.

Pierre s’en alla donc en grognonnant. Mais il n’avait pas fait vingt pas que le bon Dieu monta sur une aubépine, toute chargée de ses fruits mûrs. Le bon Dieu secoua les branches de l’aubépine et en fit tomber les fruits. Et chaque fruit devenait, avant d’arriver à terre, une belle pièce d’argent, et chaque pièce d’argent, en arrivant à terre, tintait, tintait si clair et si haut que saint Pierre tourna la tête et vit ce qui se passait. Et revenant en toute hâte, il se courba, ramassa les pièces éparses et les serra dans sa manche.

– » Pierre, Pierre ! lui dit le bon Dieu, attends un peu et laisse cet argent. Tu sais que j’en ai besoin pour payer mes dettes ».
– » Ah ! Seigneur ! Vos créanciers, peuvent rester tranquilles, comme je vois. Vous êtes en état de payer toutes vos dettes. C’est pourquoi je marcherai toujours avec vous ».


Le lamiña ravisseur

(version d’Aussurucq)

Marguerite Berterreix, de Cihigue (Soule), gardait ses brebis sur la montagne lorsqu’un Lamiña parut, la jeta sur son dos et l’emporta dans la grotte Lamiñategia, sans faire attention à sa résistance, ni à ses prières, ni à ses cris désespérés.

La nuit venue, ses parents s’inquiétèrent de ne point la voir rentrer. Dès le matin suivant, ils se mirent à sa recherche avec leurs voisins, pensant qu’elle était tombée dans quelque précipice. Mais leur recherche ayant été vaine, ils rentraient chez eux, harrassés, quand un mendiant qui venait d’Aussurucq leur apprit que, la veille au soir, il avait vu entrer dans la grotte Lamiñategia un Lamiña portant sur son dos une fille qui jetait de grands cris.

Cette nouvelle accrut le chagrin des parents, parce qu’en cherchant à pénétrer dans la grotte, ils savaient qu’ils s’exposaient à la mort. Or, dans ce temps-là, il y avait dans le pays des hommes sauvages, nommés Maidac, beaux, grands et riches que Roland chassa plus tard ; et toutes les semaines, sur la lande de Mendi, Mairiak et Lamiñak se réunissaient pour assister à quelque spectacle.

Marguerite Berterreix était depuis quatre ans dans la grotte, nourrie par les Lamiñak, entre autres bonnes choses, d’un pain blanc comme neige. Elle avait un fils âgé de trois ans.

Un jour que les Lamiñak se divertissaient au spectacle avec les Mairiak, elle dit à son fils:
« – Reste un moment sans faire de bruit, je reviendrai tantôt. »
et sortit de la grotte, puis, à toutes jambes, courut à la maison.

Ses parents eurent peine à la reconnaitre, mais ensuite ils l’embrassèrent bien et songèrent à fêter son retour. La mère seule s’attristait :
« – Les Lamiñak, disait-elle, ne tarderaient pas à venir pour chercher Marguerite, et il était urgent de la cacher. »

Tout de suite on alla creuser dans l’étable une grande fosse dont on jeta la terre dehors. On y mit Marguerite ; on couvrit la fosse avec des planches, en ménageant sous la crèche une ouverture pour laisser passer l’air ; on cacha le tout sous la litière, et on rattacha les vaches à leur place habituelle.

La besogne était finie à peine quand les Lamiñak arrivèrent, réclamant Marguerite. Les parents affirmèrent qu’ils ne l’avaient point vue et les invitèrent à visiter la maison. lls le firent et ne découvrirent rien.

Marguerite resta trois jours et trois nuits cachée dans son trou : mais ses parents, craignant la rancune des Lamiñak, prirent le parti de l’envoyer à Paris. Elle n’était pas arrivée au-delà de Tarbes que les Lamiñak étaient dans la maison de Berterreix, recommençant leurs recherches inutiles.