La sainte orpheline

Il y avait une jeune fille qui vivait loin du monde, seule, dans la sainteté. Tous les jours un pigeon lui portait sa nourriture. Un jour elle vit une jeune fille que deux gendarmes emmenaient en prison ou à la mort. La sainte orpheline se dit en elle-même :
«Si elle avait vécu comme moi, on ne l’aurait pas emmenée en prison. »

La sainte orpheline

La sainte orpheline

Et sur ce, elle eut une pensée d’or­gueil et de ce jour le pigeon ne lui porta plus à manger. Elle alla trouver un prêtre et lui raconta ce qui s’était passé et que depuis elle ne recevait plus de nourriture. Ce prêtre lui dit qu’elle avait été punie à cause de cette pensée et qu’elle devait assister à la naissance de trois enfants et voir quels seraient leurs dons.

Le premier était le fils d’un roi. Elle demanda à la reine la permission de rester dans sa chambre, dans n’importe quel coin, cela lui serait égal si seulement elle voulait bien lui donner la permission. Elle y consentit.

Quand cette reine donna naissance à un garçon, l’enfant portait autour de son cou un cordon blanc, et l’orpheline comprit qu’à l’âge de dix-huit ans il serait guillotiné. Elle vit la naissance d’un autre enfant, une fille avec un cordon rouge au cou et elle vit qu’elle tournerait mal et qu’elle se perdrait. Elle vit une troisième naissance, c’était un garçon et il portait un cordon bleu, ce qui signifiait qu’il serait très sage.

Après avoir vu cela, l’orpheline retourna chez la reine. Là elle a vécu heureuse, s’occupant particulièrement de l’enfant. Quand elle le caressait, elle lui disait souvent d’un ton triste :
« Pauvre enfant ! »

La mère remarqua cela et un jour elle lui dit : « On dirait que cet enfant est très malheureux. C’est comme ça que vous faites quand vous caressez un enfant, comme si il était très malheureux, ou comme s’il allait lui arriver quelque chose ? »

Elle lui dit cela plus d’une fois. Et comme l’âge (fatal) approchait, l’orpheline dit à la reine ce qui devait lui arriver à l’âge de dix-huit ans. Je vous laisse juger de la peine de la reine. Elle le répéta à son mari et le père et la mère le dirent à leur fils ; lequel dit qu’il devait partir de la maison tout de suite. Il parcourut alors un long chemin jusqu’à une autre ville. Et comme il avait de l’éducation, il se plaça dans une maison où il y avait un grand magasin. On y vendait de tout et comme ce jeune homme était très sage tout le monde l’aimait.

On l’entendait sortir de la maison toutes les nuits, mais on ne savait pas où. Le maître était curieux (de le savoir) et il fit un trou au-dessus du magasin, parce qu’il viendrait là aussi pendant la nuit. Il le vit prendre un cierge et mettre la valeur de ce cierge dans la caisse par le trou du comptoir, en comptant l’argent à voix haute. Prenant le cierge avec lui il se mit à genoux et alla jusqu’à une chapelle assez éloignée, marchant toujours à genoux.

Le maître le suivit pendant huit jours et le garçon faisait toujours la même chose et le huitième jour le maître regarda par le trou de la serrure de la chapelle et vit un ange descendre et jeter une chaîne à notre jeune homme et l’ange l’emporta dans les airs. Un moment après il redescendit et s’en retourna à la maison de son maître.

Le maître lui dit qu’il avait tout vu et le garçon lui dit que ses pénitences étaient aussi finies et qu’il devait rentrer chez lui. Le maître ne le voulait pas.
«Vous irez après, si vous voulez, mais vous devez d’abord épouser ma fille. »

II lui dit qu’il avait un père et une mère et qu’il ne pouvait pas le faire sans le leur dire, mais s’ils donnaient leur accord, il le ferait volontiers.

Il rentra tout de suite chez lui. Vous pensez quelle joie pour le roi et la reine ! Ils tremblaient constamment de peur d’apprendre que leur fils bien-aimé avait été pendu. Ils ne savaient plus que faire de joie. Il leur raconta comment il avait fait pénitence et que sans doute le bon Dieu lui avait pardonné et comment son ancien maître voulait le marier avec sa fille. Ce qu’il fit et tous vécurent heureux et moururent bien.