Les Quatre Branches du Mabinogi

Les Quatre Branches du Mabinogi

Index

Les Mabinogion arthurien:

Contexte

Les Mabinogion ou les Quatre Branches du Mabinogi (Pedair cainc y mabinogi en gallois) sont quatre textes médiévaux (des chwedl ou cyfarwyddyd, mots qui signifient contes), écrits en moyen-gallois (langue en vigueur du XIIe siècle au XVIe siècle), qui font référence à la mythologie celtique de l’Antiquité. Traditionnellement, s’y s’ajoutent d’autres contes relevant de la légende arthurienne. Le mot Mabinogion est le pluriel de Mabinogi. Diverses explications sur le sens du mot ont été avancées, mais il vient vraisemblablement du dieu Mabon (Maponos en Gaule) qui figure dans le conte Kulhwch et Olwen, et qui fait partie de la même collection. Les quatre récits s’intitulent : Pwyll, prince de Dyved, Le Mabinogi de Branwen, Manawydan fils de Llyr et Math fils de Mathonwy.

Les Mabinogion ont été élaborés à partir de deux manuscrits, le Livre Blanc de Rhydderch dont la rédaction s’étale de 1380 à 1410, et le Livre Rouge de Hergest qui est daté approximativement de 1350. Rappelons que dans le monde celtique, la poésie était la spécialité des bardes. Les thèmes développés se retrouvent dans la tradition irlandaise, ce qui atteste de leur antiquité. On peut citer, à titre d’exemple, les rapports du druide (ou magicien) et du roi, les obligations de la Souveraineté, l’Autre Monde (le Sidh des Tuatha Dé Danann, en Irlande), la guerre, la pratique des fonctions artisanales. C’est l’illustration de l’idéologie trifonctionnelle des Indo-européens, telle qu’elle a été exposée par Georges Dumézil. Tout comme pour les textes mythologiques irlandais, un vernis chrétien se superpose parfois aux récits.

Dans la vague de celtomanie du XIXe siècle, une première publication expurgée en anglais a été faite par Lady Guest entre 1838 et 1849, dont certaines parties ont été traduites en français par Théodore Hersart de la Villemarqué, mais c’est Joseph Loth qui va établir la première édition française intégrale.

La rédaction tardive indique une longue tradition orale, ces mythes se sont transmis de générations en générations, à travers les siècles ; de ce fait il n’est pas possible d’en préciser l’origine (voir l’article consacré aux druides).

Détails des quatre Branches

Pwyll, prince de Dyved 

Pwyll a fait un pacte avec Arawn le roi de l’Annwvyn, l’Autre Monde des Celtes, pour devenir le maître du royaume de Dyved. Cette accession à la fonction souveraine se traduit par un changement de nom, il devient le « chef de l’Annwvyn ». Son règne est caractérisé par l’équité, la justice et la générosité. Pour légitimer son nouveau pouvoir, il doit se trouver une reine, il rencontre Rhiannon, dont le nom (issu de Rigantona) signifie « Grande Reine » ; c’est un avatar de la divinité celtique féminine (voir Brigit, Brigantia). Il élimine son rival Gwawl et tous les autres prétendants. S’ensuit une série de banquets et de cadeaux. Rhiannon, est faussement accusée d’infanticide, alors que son fils Pryderi a été enlevé, et doit faire pénitence – l’insertion de cet épisode vise à christianiser le récit.

Ce conte a pour sujet, l’origine, le fondement et la légitimité de la royauté. Le contrat passé avec un roi de l’Autre Monde indique clairement l’origine divine. Le mariage de Pwyll avec la déesse Rhiannon est conforme à la mythologie celtique puisque la souveraineté est un concept féminin. La justice et la générosité du roi sont deux qualités fondamentales et indispensables de la fonction.

Le Mabinogi de Branwen

Branwen, fille de Llyr et sœur de Bran le Béni, a été demandée en mariage par Matholwch, le roi d’Irlande. Cette union est une sorte de contrat qui doit assurer la paix entre les deux nations. Evnissyen qui n’a pas été consulté, tente de ruiner cet accord : il coupe les lèvres, les oreilles et la queue des chevaux irlandais. Pour réparer l’offense, Bran offre de nouvelles montures et un chaudron magique. Branwen est emmenée en Irlande où elle est accueillie avec faste. De cette union naît un fils Gwern, mais le roi s’est lassé de son épouse, il lui fait renoncer à son titre de reine, et la fait travailler aux cuisines. Pendant trois années de ce traitement, elle élève secrètement un étourneau, puis l’envoie à son frère, avec un message à la patte. Immédiatement, il entreprend une expédition militaire.

Le second conte des Mabinogion, traite des relations difficiles entre les nations celtes. La guerre est le thème central, et on voit une glorification du guerrier héroïque. La guerre, les razzias sont d’ailleurs des notions récurrentes dans la civilisation celtique. Bran est un géant, dont le nom signifie « corbeau », animal emblématique des divinités associées à la mort.

Manawydan fils de Llyr

Manawydan, fils de Llyr, a épousé Rhiannon, après le décès de son premier époux, Pwyll. Lors d’une promenade à laquelle se sont joints Pryderi, le fils de Rhiannon et Kigva son épouse, un orage soudain éclate, suivi d’un brouillard magique, qui laisse le pays dévasté et désert. Après avoir épuisé, les provisions de la maison, ils décident d’aller en Angleterre afin d’exercer un métier et subvenir à leurs besoins. Ils s’installent à Henford comme selliers, ils réussissent si bien que les autres artisans de la ville, jaloux, les chassent. Ils vont être fabricants de boucliers, puis cordonniers, avec autant de réussite et d’exil. De retour en Dyved, ils se font chasseurs, puis agriculteurs.

Selon le schéma dumézilien, ce récit décrit la troisième classe de la société, celle des artisans/producteurs et des agriculteurs/éleveurs. Les deux autres classes sont celle des druides et celle des guerriers. Le rôle des artisans (au sens le plus large) est produire pour l’ensemble de la société. Manawydan est l’équivalent gallois de l’Irlandais Manannan Mac Lir

Math fils de Mathonwy

Math est le roi du Gwynedd, réputé pour sa magie. Son nom est apparenté à celui de l’ours, qui est l’animal emblématique de la royauté. Il ne peut vivre que les pieds dans le giron d’une vierge, excepté pendant les périodes de guerre. La jeune fille qui remplit cet office se nomme Goewin, elle fiancée à Gilvaethwy. Le druide Gwydyon, neveu de Math, déclare la guerre à Pryderi pour forcer son oncle à intervenir, et permette à Gilvaethwy de prendre la jeune fille libérée. Usant de sa magie, le roi berné les transforme en animaux. C’est Arianrhod qui doit prendre la place de Goewin, et Math doit vérifier sa virginité avec sa baguette magique. Parallèlement, Gwydyon doit faire l’éducation de Lleu, qui est en fait un avatar du tout-puissant Lug.

Le dernier conte des Mabinogion est plus spécialement consacré aux fonctions de la classe sacerdotale. Le rôle de Goewin, en tant que principe féminin, est de légitimer la royauté de Math, qui ne s’occupe que de la prospérité et de la guerre. Gwydyon est le prototype du druide, omnipotent et Omniscient, qui se doit d’initier, son neveu qui, par sa qualité trifonctionnelle (voir l’article Lug) peut aspirer à la royauté.