Contexte de l’Ancienne Religion

La sorcellerie de Toscane est unique entre tous les autres types de sorcellerie en Italie puisque l’Ancienne Religion de Toscane a ses racines dans l’antiquité étrusque et contient moins d’influences romaines.

Ancienne Religion

L’Ancienne Religion

Durant la période néolitique de l’Italie, on connaissait une culture appelée aujourd’hui le Culte de la Déesse-Mère. Les découvertes archéologiques relatent une période particulièrement abondante de laquelle sont datées une abondante série de statuettes de la déesse et de son époux.

Certains archéologues, comme Marija Gimbutas, croient que les Étrusques étaient les héritiers des croyances et pratiques de ce culte fort ancien, mais aussi d’un autre, connu sous le nom de «culte des morts», les deux étant pratiqués autrefois sur la péninsule italienne. Cette région fait partie de ce que l’on appelle aujourd’hui la Vieille Europe, qui inclut non seulement l’Italie mais également la Grèce, la République Tchèque, le sud de la Pologne et l’ouest de l’Ukraine. Les concepts archaïques de la Vieille Europe ont prospéré même après le début de l’ère chrétienne.

C’était particulièrement vrai à travers la péninsule italienne. Les écrivains hellénistiques et romains étaient souvent étonnés de découvrir les traces des pratiques et croyances primitives provenant des vieilles régions étrusques, pratiques et conceptions qui ressemblaient d’ailleurs beaucoup à celles reconnues en Grèce et à Rome à ce moment-là. Il y avait entre autres la notion de l’animisme, l’omniprésence des signes, des arts divinatoires, des malédictions et oracles, etc.

Les femmes étrusques avaient une importance égale sinon supérieure aux hommes dans la société en générale mais surtout au point de vue religieux et spirituel, un leg de la religion matriarcale qui s’est épanouie autrefois dans la Vieille Europe. Une autre croyance importante à mentionner est que les Étrusques croyaient en la survie «matérielle» des morts à leur endroit d’enterrement.

Ils plaçaient dans leurs tombes les objets et effets personnels ayant appartenu aux morts, des jeux, des outils, etc. Dans la religion romaine archaïque, nous retrouvons des pratiques similaires sur les sites d’enterrement. Ceci laisse croire que le culte des morts étaient très important.

Les Étrusques croyaient aux pouvons «surnaturels». Tous les actes de la Nature étaient vus comme commandés par un esprit ou un dieu. Plusieurs présages précédaient l’apparition ou l’action d’un être «surnaturel». Dans le but d’établir de bonnes relations avec les esprits et déités, on disposait des offrandes à leur attention.

En lien avec les croyances des Étrusques à propos des présages, est l’ancien mythe des animaux guides (totems) et des ancêtres. Les premières tribues nomades en Italie croyaient en l’esprit d’un animal qui les protégeait et les guidait. La tribue Piceni, par exemple, croyait que leur guide était un pivert, pour les Sabeliens c’était un taureau, pour les Lucani, un loup et pour les Ursenti, un ours. Ces tribues et autres environnantes avaient une coutume connue sous le nom de Ver Sacrum, le printemps sacré.

Cela nécessitait que quelques membres d’une tribue la quittent quelques temps pour s’installer plus loin dans la région chaque printemps. À ce moment, le totem pouvait être rencontré en vision, en rêve.

Comme les humains ont évolués à travers les sociétés agraires, les esprits des prés et des forêts ont été «transformés» en esprits des champs labourés et semés. Ce sont les Lasa, des êtres partageant avec eux des liens ancestraux très proches. Sous l’Empire Romain, ces esprits étaient appelés Lare et furent une fois de plus transformés en esprits de la maison et de la famille, faisant des Lare des protecteurs de la famille, préservant leur mémoire et descendance.

Les Étrusques ont ensuite développé et raffiné plusieurs croyances païennes primitives, créant une tradition mystique et magique. Des siècles avant que Rome n’arrive au pouvoir, les Étrusques vouaient un culte à la Grande Déesse-Mère Uni et son époux Tinia. Ces déités gouvernaient une horde de demi-dieux et d’esprits et dispensaient leurs pouvoirs aux forces de la Nature, décidant de la destinée des humains.

Le panthéon des Étrusques n’était pas différent des dieux Olympiens de la Grèce, bien qu’ils vénéraient d’autres dieux au-dessus d’eux. Ces déités étaient connus sous le nom de Involuti ou les dieux des brumes.

Les Sorcières/Sorciers de Toscane sont les descendants directs du peuple étrusque. Pendant plusieurs siècles, ils ont gardé leur existence secrète, chuchotant tout bas aux dieux anciens vénérés par leurs ancêtres, les nuits où la lune est visible dans le ciel. Des générations ont fait connaître la Vieille Religion à leur descendance, préservant le savoir rituel et magique de l’ancienne sorcellerie italienne.

Au début du 17e siècle, un moine ambrosien nommé Francesco Guazzo a écrit un livre traitant de l’héritage des Sorcières et Sorciers italiens intitulé Compendium Maleficarum. Au sixième chapitre, Guazzo parle des «traces héritées» de la Sorcellerie chez des enfants nés pour être sorciers. Plusieurs chapitres traitent des cérémonies dans lesquelles des enfants sont «baptisés», consacrés à la «secte» des Sorcières, en plus de parler des cérémonies de mariage entre sorciers. Guazzo énonçait que tout cela n’était que dans le but de «propager» la race des sorcières.

Les plantes et particulièrement les herbes sont associées aux sorcières depuis toujours. Dans les écrits d’Homère, les sorcières se retrouvaient dans les clairières des forêts. Ovide disait qu’elles se rencontraient sur des collines d’herbes. Avec la période hellénistique, nous avons des références relatant que les sorcières pratiquaient et vivaient dans les villes, se procurant leurs herbes dans les marchés publics ou dans les cimetières, et ne vivaient donc pas forcément reculer de toute civilisation, en ermite. On dit aussi que les sorcières de ce temps pouvaient pratiquer sous un toit, à l’intérieur.

Il est intéressant de noter que le mot «sorcière» en grec ancien est «pharmakis», littéralement «herbaliste» et que c’est de ce mot qu’a été créé celui de pharmacie. Pour les Romains, le mot «sorcière» se disait «venenum», se référant plutôt aux herbes empoisonnées. De venenum, ils ont créé le mot veneficium, le mot latin pour «sorcellerie». Le nom latin pour sorcière est donc aujourd’hui «venifica», mais se rapportait autrefois à la signification de «femme-sage».

C’est ainsi très clair que les sorcières de ce temps et de cette région savaient user des herbes. Dans le folklore de cette région, chaque plante est dite habitée par un esprit ou une conscience, le Numen, et c’était cela qui donnait à la plante toutes ses propriétés magiques et/ou curatives. Le concept de Numen a évolué pour plus tard devenir celui des fées ou esprits de la Nature.

Dans la sorcellerie toscane, on croit qu’il existe une relation très intime entre les fées et les sorcières/sorciers, les deux possédant une connaissance profonde de la magie et étant très liés à la nature. En Toscane, la Reine des Fées est connue sous le nom de Alba ou Turanna. Aldegano est un esprit-fée des lierres et Tarabug est l’esprit de la rue (plante) et le gardien des roseaux. La rue et la lierre font partie des plantes magiques les plus utilisées pour la sorcellerie toscane. La rue, la lierre, le sel et le vin sont utilisés pour invoquer la Déesse et pour appeler les esprits et les fées.

Relativement à la croyance sur les fées sont les trois déités ou esprits de la Destinée, connus sous les noms de Maratega, Rododesa et Befana. Elles font la rotation des vies de tous les humains, tissant l’histoire et le destin de chaque individu et coupent le fil de vie lorsque la conception est terminée. On peut les assimiler aux Nornes des scandinaves (Urd, Verdandi et Skuld), aux Parques des Romains (Nona, Decima et Morta) ou aux Moires des Grecs (Clotho, Lachésis et Atropos).

La divination est un aspect important de la sorcellerie toscane et est utilisée dans le but d’avoir un aperçu du destin tissé par les trois Fata (fées) de la Destinée. Befana est également un esprit ancestral dont le symbole est un bas tissé. Des bas ou chaussettes étaient d’ailleurs accrochés au-dessus des foyers à la nuit du 6 janvier dans l’espoir e la visite de Befana. Le foyer est une symbole de vie familiale et d’unité et c’était une endroit où on retrouvait chaleur et compagnie. Durant la nuit du 6 janvier, Befana remplissait les bas de cadeaux pour les enfants, créant ainsi un contact avec chaque nouvelle génération.

Attilio est un esprit des foyers et associé aux Lare, les esprits ancestraux habitant les foyers. Setlano est un esprit du feu invoqué pour la divination. Traditionnellement, lorsqu’un feu brûle à l’intérieur d’un foyer, on peut voir des présages du futur dans l’interprétation des flammes et des étincelles. Les êtres élémentaux du feu sont les Salamandres et peuvent apparaître dans les flammes sous forme d’oracles.

Mena, un autre esprit du feu invoqué pour l’amour et le mariage, apparaît habituellement sous la forme d’un serpent. Les jeunes femmes et jeunes hommes posent alors leurs questions au feu, observant les flammes changeantes pour obtenir leurs réponses. Ceux et celles qui espèrent trouver l’âme soeur font appel à l’esprit Marta. Elle est également reconnue pour raviver le feu de la passion dans un couple, d’où son association au feu divinatoire.

Les pratiques primitives sont la clef de voûte de la sorcellerie toscane et un signe de l’antiquité de cette tradition. Plusieurs aspects de cette ancienne forme de sorcellerie ont été préservés dans les archives de l’Inquisition italienne. Un cas particulier qui doit être pris en considération, concernait une femme appelée Elena Draga. En 1571, elle a été amenée devant l’Inquisition pour avoir user de sorcellerie afin de guérir des gens. Un de ses sortilèges consistait à frotter un morceau de viande crue sur une verrue.

Puis, elle enterrait la viande, de sorte que comme celle-ci se décomposerait, la verrue disparaîtrait. Une autre de ses cures consistait à laver une personne malade avec de l’eau, puis lors de la troisième ou quatrième phase de la lune, il fallait attendre la marée basse et jetter l’eau sale dans l’océan, ainsi la maladie partait. On note d’ailleurs que la plupart des pratiques curatives des régions côtières d’Italie se basaient sur les phases lunaires et utilisaient les marées des océans.

Les Sorcières/Sorciers sont très attachés à leur tradition ancestrale et l’ont toujours protéger, discutant rarement de ce sujet aux non-initiés.